
| Votez Merde !
Bien sûr, « Merde », ce n’est pas très élégant… Même si ce mot à acquis
ses lettres de noblesse grâce à Cambronne, général de son état, auteur
également de la phrase célèbre :« La garde meurt et ne se rend pas »
(ce qui semble logique, si elle meurt …).
Vulgaire ou familier suivant le dictionnaire, le « mot de 5 lettres »
désigne dans son acception familière une « exclamation de colère,
d’impatience, de mépris » (Petit Robert). Être dans la merde est une
image très claire. |
Votez
Merde ? Vous l’avez compris, je veux parler du vote blanc. Un
chèque en blanc, un blanc-seing, un mariage blanc ? Non, non et
non.
Google recense environ 396'000 pages en français pour la recherche
« vote blanc ». On peut lire, en vrac, que le vote blanc est
un moyen de s’exprimer et de participer, qu’il n’apparaît pas dans les
résultats diffusés et le décompte des voix
(
http://www.chez.com/voteblanc/pourquoi.htm), qu’il est différent d’un
vote nul (
http:// www.vie-publique.fr/decouverte_instit/ citoyen/), que
le droit électoral français ne reconnaît pas le vote blanc comme un
vote exprimé. Il y a même un parti qui milite pour le droit à la
reconnaissance du vote blanc (
http://www.partiblanc.fr/).
Le terme « abstention » lui-même est un terme galvaudé :
celui qui s’abstient est un votant dans un referendum (réponse
« oui », « non », « abstention ») et non
pas quelqu’un qui va à la pêche.
Je connais des associations qui, dès que l’abstention atteint un
certain seuil, annulent purement et simplement le vote et
éventuellement le représente en le formulant différemment, plus
clairement. Pourquoi ne pas instaurer un tel quota pour annuler nos
referendums (blancs ou abstentions = 30% des votes
exprimés) ?.
Prenons le thème de certaines votations locales en Suisse : Oui ou
Non pour la construction d’un parking situé à Troufigny-les-Hauts.
« C’est encore pour la bagnole, nianiania, on pourrait faire un
parc, tralalère, mais ça permet de développer les transports publics,
moins de pollution en ville, tralala , et puis, je m'en fous,
j'habite de l'autre coté. ». Oh Oh ! Autre exemple à
l’échelle cantonale ou fédérale: referendum pour la réforme de
l’article 132 bis, alinéa 7a, concernant l’assurance truc dans le cadre
de la loi fédérale n° 2341 et des applications de la loi cantonale et
des lois … Stop ! 50 pages de textes écrits en jargon légal à se
taper avant de se faire une opinion. Bien sûr, les partis ou les
syndicats font le boulot pour lancer des consignes, pour informer.
Votez Oui ! Votez Non ! Mais je fais quoi, moi, quand je ne
suis pas un militant docile ?
Un autre exemple : vous êtes pour une constitution européenne,
mais vous êtes contre le texte lui-même, vous voulez quelque chose de
plus social, de plus libéral, de moins ceci, de plus cela…Et vous avez
le choix entre « oui » et « non ». En plus, on vous
traite de con si vous votez « non » (« voter non est une
connerie », Chirac dixit).
Eh merde ! j'la connais pas par cœur, votre Constitution, je me
gave de journaux et j’entends des choses contradictoires, de la
mauvaise foi, de la langue de bois, du Bolkenstein, de l’écolo
schizophrène et du réac forcené ! Bien sûr, on n’est pas stupide,
on comprend bien qu’il n’est pas possible de voter pour chaque virgule
d’un texte, il faut se décider pour le paquet, sinon rien n’avance.
Mais à force de voter sur des paquets, on perd le contact avec les
objectifs politiques ! Vous, européens, vous avez lu le traité de
Maastricht, avant de voter ? Moi, européen, j’ai voté sans le lire…
Eh merde ! On vote pour une équipe, elle prend les commandes et
elle applique la politique pour laquelle elle a été élue d’une manière
professionnelle et dans le cadre des lois! (Voir à ce sujet
l’article de ztr « Du politicien et de sa méthode »,
http://www.paysromand.ch/tribune/20020228lundi/). Si le boulot n’est
pas fait ou pas satisfaisant, les électeurs font l’arbitrage à la
prochaine élection et ciao.
Il ne s’agit pas de remettre en question le droit démocratique à
l’organisation de votations et de référendums, mais de prendre en
compte la réaction exprimée des électeurs par un vote blanc:
« on n’a pas compris, c’est pas nos oignons, la formulation est
« merdique », faites votre boulot, votre politique est nulle,
je déteste la politique, je suis punk ». Pour résumer :
j’estime qu’il est nécessaire de voter sur des sujets en étant informé
et en ayant un vrai débat, mais, quand l’exposé n’est pas clair,
l’électeur a le droit de dire « Oh, Mesdames et Messieurs, votre
copie est mauvaise, retournez faire votre boulot ! ».
Alors, disons que parfois on peut voter « Merde ! » et
qu’il faut que cette voix soit prise en considération. Un vote qui
exprime une exclamation de colère, d’impatience ou de mépris, la
situation difficile dans laquelle on se trouve… Ça sonne bien,
non ?
« Après tout, merde ! Avec ce grand mot on se console de toutes les misères humaines. » Flaubert .
ojm